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De la Superpuissance à la Puissance émergente

Sirina ARISS, Première

 Pensez-vous que c’est un tueur? Les Etats-Unis répondent oui

Dans une interview télévisée menée par George Stephanopoulos, journaliste vedette de la chaîne américaine ABC, diffusée mercredi 17 mars, Joe Biden a déclaré penser que son homologue russe Vladimir Poutine était «un tueur» et a promis qu’il paierait «le prix» de ses actes, provoquant la première crise diplomatique de son mandat. Joe Biden faisait-il référence à l’affaire Navalny? Avait-il prévu d’aller aussi loin? Souhaitait-il risquer l’ire du Kremlin?. En réaction, Moscou rappelle son ambassadeur aux Etats-Unis Anatoli Antonov et consulte les moyens de rectifier les relations diplomatiques. Vladimir Poutine s’est moqué de son homologue américain en déclarant «c’est celui qui le dit qui l’est» lors de propos retransmis à la télévision russe. Est-ce une déjà vu de Guerre Froide? 

Un retour en arrière est nécessaire. D’où est issu cette Russie que nous observons aujourd’hui? Fondée en 1922, l’URSS, héritière de l’empire des tsars, était formée de quinze républiques socialistes soviétiques, la République de Russie étant, de loin, la plus puissante de l’union. Pendant plus de quarante ans, l’URSS apparaît avec les États-Unis comme l’une des deux superpuissances du monde qui structurent la géopolitique dans le cadre de la guerre froide. L’URSS contrôle les territoires de l’Est de l’Europe et impose son système communiste. Son modèle se diffuse dans le monde, notamment en Asie, en Afrique ou encore à Cuba. Un monde bipolaire s’instaure alors entre le bloc communiste et les Etats-Unis et leurs alliés capitalistes. Cette fédération se disloque et disparaît en décembre 1991 avec la victoire du modèle américain. C’est un choc pour le monde entier, notamment pour les Russes, qui considèrent la fin de l’URSS comme la fin d’un monde. 

Avec des effectifs militaires divisés par deux, des tensions frontalières nombreuses, et la victoire des Etats Unis qui deviennent une hyperpuissance, la Russie doit repenser sa place dans le monde et cherche jusqu’à aujourd’hui a s’affirmer sur le plan international. En effet, bien que la Russie a toujours une place au niveau international, il faut rappeler qu’il s’agissait principalement d’une superpuissance qui s’élevait au rang des Etats unis et qui “dominait la moitié du monde”. Ainsi, lorsqu’on fait référence à la Russie, il est incontournable de préciser qu’il s’agit d’un pays qui cherche à pallier son manque de puissance, à garder un rôle dans les relations internationales et à développer une capacité de résistance à la volonté des grandes puissances. L’année 1991, est donc un point charnière qui marque une rupture quant à la puissance russe. On peut donc parler d’un avant (l’URSS étant une superpuissance) et un après (la Russie devenant une puissance). La transition de l’URSS à la Russie, de la superpuissance à la puissance tant aussi bien sur le plan politique avec son passage d’un régime dictatorial à une démocratique théorique que sur le plan économique avec un passage d’une économie planifiée à une économie de marché. Les années de Putin, qui s’étendent depuis 1999 jusqu’à aujourd’hui, mettent donc en exergue que la Russie continue à se construire, à s’affirmer. Ainsi, Putin renforce l’exécutif, réaffirme le pouvoir de l’Etat central sur les régions, place ses hommes et ses bases militaires à des postes clé et renforce le contrôle sur l’économie. Il va même se projeter dans les années à venir et tend vers de nouvelles ambitions à la conquête de l’Arctique et ses hydrocarbures.

Cependant cerner la trajectoire de la Russie aujourd’hui semble un véritable défi. Puisque en apparence démocratique, la Russie continue à faire preuve d’un régime autoritaire, dans lequel le président est élu et réélu et la corruption est endémique. En menant une économie de marché purement capitaliste qui tend vers de nouvelles ambitions, la Russie encourage les mouvements pro-russes dans la région ex-URSS. En s’approchant du modèle américain, de l’économie libéral, la Russie se positionne comme une puissance eurasiatique qui intervient contre les Etats Unis en Syrie comme en Irak et défend des intérêts communs avec la Chine. Quelle est donc la trajectoire de Poutine?  Chercherait t-il rebâtir l’URSS sur des bases capitalistes?

Il s’agit donc d’un déjà vu bien sûr, mais différent cette fois, puisque l’équilibre qui existait entre les deux blocs est loin d’être dépassé.  L’économie russe reste très inférieure à la puissance économique des États-Unis. Les capacités d’intervention militaire de la Russie sont très loin d’égaler celles des États-Unis.  Et enfin son soft power n’est pas comparable à celui des États-Unis. Pour répondre de nouveau à la question “Qui est la Russie?” 

C’est un pays qui a perdu le préfixe “super” de sa puissance et qui cherche constamment à combler le manque laissé par 1991, en s’ouvrant vers le capitalisme liberal tout en établissant ses distances de son “ex” ennemi. Il est évident que le meilleur moyen de le faire c’est en se rapprochant de la Chine, l’hyperpuissance naissante.

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